Les diamants de Cambridge
En début d’année, j’ai eu l’honneur de participer à l’exposition Interlaced : An Exhibition of Textile and Computational Art qui s’est tenue à Cambridge entre le 9 et le 30 mars. L’occasion pour moi de partager mon travail à l’étranger mais aussi de contribuer à faire connaitre le tissage aux cartes. Pendant 1 mois, ce sont 18 artistes qui ont exposé leurs œuvres textiles et/ou numériques dans l’écrin magnifique de l’Église All Saints’ Church. Et j’ai eu l’immense honneur de faire partie de ses 18 femmes aux talents extraordinaires !
Vous pouvez retrouver le premier article consacré à l’exposition Interlaced juste ICI

La genèse de l'exposition
Pour cette exposition, j’ai eu carte blanche vis-à-vis des galons que je pouvais exposer : je n’avais pas de limite de nombre ou de contrainte de longueur par exemple. Je pouvais faire absolument tout ce que je voulais ! C’était une chance incroyable et en même temps, ça me laissait tellement de possibilités que j’étais un peu perdue sur ce que j’allais proposer.
Pour réduire mes possibilités, je me suis en premier renseigné pour savoir si des galons tissés aux cartes avaient été retrouvés à Cambridge. Parce que l’occasion était trop belle de pouvoir exposer dans un lieu aussi prestigieux la reproduction d’un galon qui y avait été retrouvé. Et après plusieurs heures de recherches, je suis tombé sur un vieux rapport d’archéologie de Mr Crowfoot et daté de 1951. Ce fut une révélation ! Un galon avait été retrouvé au début des années 50 lors de l’agrandissement d’un terrain de criquet de l’une des nombreuses universités de la ville.
L’article de la revue archéologique était bien entendu en anglais mai la numérisation était de bonne qualité ce qui m’a permis de bien voir les quelques photos en noir et blanc ainsi que les schémas réalisés par l’auteur. Ce sont surtout ces derniers qui m’ont aidé à reproduire le galon qui est connu sous le nom des diamants de Cambridge, ou encore du galon du Saint-John’s Cricket Field. Cet article donne des informations sur la composition et les couleurs du galon mais aussi sur les conditions dans lesquelles il a été découvert. Il s’agissait donc d’un galon en lin avec des fils de trois couleurs : blanc, bleu et bleu foncé.
La reconstitution du galon des diamants de Cambridge
D’après l’article de Monsieur Crowfoot, j’ai commencé à faire un premier test de reproduction. Pour cela, j’ai utilisé des fils de coton tout simple aux couleurs de l’original donc du blanc, du bleu et du bleu foncé. Monsieur Crowfoot présente dans son article un patron de montage qu’il a lui-même utilisé quand il a essayé de reproduire le galon des diamants de Cambridge. Je me suis donc basé sur son patron tout en faisant particulièrement attention au sens d’enfilage des fils dans les cartes. Vous savez les fameux S et Z qui nous embêtent presque systématiquement lors qu’on fait l’ourdissage d’un tissage ! L’étude du galon d’origine a permis de compter 19 cartes, ce qui représente déjà un bon paquet de cartes et donc de fils à découper puis à ourdir.
Pour mon « galon test » j’avais prévu une certaine longueur de fils pour pouvoir faire plusieurs essais et parce que je ne savais pas trop combien de tentatives il allait me falloir pour réussir. Dans l’article sur lequel je me suis appuyé, il n’y a pas vraiment d’explications sur les rotations des cartes, j’ai donc du faire des essais, tester des choses et voir ce que ça allait donner. Les quelques photos en dessous représentent mes premiers essais, les premiers ne sont pas fantastiques mais ça commence à ressembler à quelque chose à la fin !

Une fois que j’ai été satisfaite de mes essais et des tests que j’avais pu faire, je me suis lancé sur la vrai reproduction du galon des Diamants de Cambridge que j’allais envoyer à l’exposition Interlaced. Les fils d’origine sont en lin mais je n’en avais pas pour les couleurs correspondantes et je n’avais pas vraiment assez de temps devant moi pour pouvoir en commander. En revanche, j’avais en stock des magnifiques pelotes de soie (mêlée d’un peu de laine) dont les couleurs étaient juste parfaites ! J’ai donc choisi de reproduire le galon en soie avec du blanc, du bleu profond et un bleu plus clair et vif.
Une fois mes couleurs et mes fils choisis, j’ai fait un nouvel ourdissage sur les 19 cartes nécessaires pour ce galon. Cela m’a prit environ 2 heures et j’avais une chaine longue de près de 2,5 mètres, soit la totalité de mon InkleLoom sur lequel je travaille le plus souvent. Et s’en sont suivi pas loin d’une dizaine d’heure pour tisser tout ça, la soie étant très fine, le tissage a forcément prit plus de temps que pour mon « galon test » en coton plus épais.
Et c’est finalement avec beaucoup de fierté que j’ai découpé le galon pour le sortir du métier à tisser et enlever les cartes des derniers fils. J’ai choisi de faire des finitions très simples avec seulement une petite tresse d’une demi-douzaine de centimètre à chaque extrémité. J’ai eu le temps de prendre quelques photos par un jour ensoleillé avant d’envoyer ce galon (et ses copains) en direction de l’Angleterre à la fin du mois d’avril.




Et comme vous avez pu le voir dans l’article précédent consacré à l’exposition Interlaced (que vous pouvez trouver ICI si vous ne l’avez pas encore lu), j’ai envoyé plusieurs galons à Cambridge. J’ai choisi de vous présenter celui-ci en premier car lorsque j’ai préparé l’exposition, il s’est imposé à moi comme une évidence. Un peu comme la possibilité de faire revivre un patrimoine vieux de plus d’un millénaire et de le renvoyer au plus près de chez lui. Et parce que je ne pouvais passer à côté de tisser ce motif pour une telle exposition.
Vous retrouverez dans de prochains articles la présentation des autres galons que j’ai exposé durant tout le mois de mars à Cambridge. N’hésitez pas à laisser un petit commentaire sous cet article pour me dire ce que vous en avez pensé 😉
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